Tes doigts glissent sur l’interrupteur,
les néons t’aveuglent.

Il est trop tôt pour travailler.

Soirée alcoolisée, nuit bien trop courte, appel en urgence pour un client régulier. Bien sûr tu n’as pas refusé, tu ne refuses jamais du travail même si tu as nettement le luxe de le faire. Alors tu t’es levé malgré l’heure qu’on ne pourrait même pas qualifier de matinal tant elle s’en éloigne, mais pas assez pour ne pas t’apprêter correctement. Robe -courte- faite de soie, couleur crème, petits talons aiguilles lacés blanc, assez de pierres pour ouvrir une bijouterie et maquillage on point.

La fatigue n’empêche pas d’être jolie.

Ta cliente t’a apporté l’animal très tôt et, à peine arrivée, tu comprends vite que tu as accepté à la hâte un rendez-vous qui aurait pu attendre. Mais tu es là, la gentille Yuki aussi, sa maîtresse est partie et tu te prépares donc à passer ta matinée entre félines.
Tu troques tes belles semelles pour des chaussures en mousse hygiéniques, retire tes scintillantes parures et enfile une blouse blanche après avoir attaché tes cheveux. Une piqûre anesthésiante, l’assurance qu’elle est en vie et une intubation plus tard ; la petite sacré de birmanie a les quatres fers en l’air prête à passer à la casserole.

Comme toi hier soir.

Tu retournes en salle d’attente pour fermer boutique à clef, peu l’intention de voir d’autres urgences débarquer car tu ouvres uniquement sur rendez-vous et donc seulement pour Yuki aujourd’hui.

Mais quelqu’un est déjà là,
À ton grand malheur.

Seulement tu n’as pas le temps de lui dire quoi que ce soit qu’il t’aborde d’un bonjour dans une autre langue, ce à quoi tu ne t’attendais pas vraiment. Le chapeau qu’il porte sur sa tête te surprend tout autant… Mais ça a le mérite de correctement capter ton attention. Mais tu vas de surprise en surprise en l’écoutant parler, passant d’une drague naze à l’allure d’un chien battu au pervers cherchant à jouer les canards pour sa dulciné.

Ton visage étonné se transforme en une mine de dégoût.



Les gens qui cherchent à passer la journée avec toi, en général, ils paient.
Et ils paient cher.

La situation est surréaliste, inimaginable. Mais tu en vois de toutes les couleurs avec ton métier principal, et tu connais les règles du jeu… Tu ne comprends pas vite, mais tu sais. Tu as vu ce défi passé plusieurs fois sur l’application, t’es toujours amusé à imaginer ce que tu ferais si un player viendrait un jour se servir de toi pour obtenir butin de partie. Tu pourrais bien te tromper, mais tu flairs le défi et tu en mettrais presque ta main à couper.

La lumière blanche reflète sur ses boucles,
Et tu as soudainement envie de lui arracher ce sourire niais.



Moment de réalisation.



Tes journées sont bien remplies Felicy, aujourd’hui n’est pas exception. Peut-être pourrais-tu te servir de la rage au ventre de l’un de ces idiots pour travailler à ta place. Ou bien pour vraiment te lécher les pieds.

À tes mots, un changement radical de comportement de sa part. Tes doutes sont donc fondés, vous savez tous les deux ce qu’il en est ; rien ne sera confirmé mais vous savez tous deux comme D-VICE n’aime pas les balances, alors le secret sera bien gardé.

À vrai dire, son âge non plus t’en avait pas non plus grand chose à foutre, c'est vrai. Mais les idées fusent rapidement dans ta tête, allant du plus simple au bien plus recherché et tu dois t’assurer de ne pas faire travailler n’importe qui… Il a l’air plutôt jeune, tu veux simplement être assuré de ne rien risquer. S’il pensait que tu allais simplement lui demander de te faire la popote et de te masser le dos, le garçon allait vite déchanter.

Étonnamment,
Tu aimes la façon dont il te répond.

Tu as bien assez de gens à tes pieds,
un peu de challenge parfois n’est pas de refus.

Vingt-deux c’est bien. Vingt-deux c’est parfait.

Tu aurais pu lui demander si la vue du sang était désagréable pour lui, mais encore une fois tu t’en tamponnes royalement, sachant pertinemment qu’au contraire ses viewers allaient adorer. Tu tournes les pieds, lui donne les instructions.

dis-tu avant d’ouvrir un placard et de lui donner des chaussures emballées dans un plastique, un tablier du même acabit et un masque chirurgical. Tu le fais te suivre dans la salle d’opération après lui avoir demandé de laisser ses affaires sur ton bureau, lui indique l’évier pour qu’il se lave les mains avant de te rejoindre pour observer le sujet principal de cette matinée.

dis-tu en la présentant avec tes mains, grand sourire.

Tu lui tends la tondeuse.

en indiquant avec tes doigts le ventre de la chatte.

Pour le coup la minette est très belle, tu adores avoir rendez-vous avec elle, bien que là à part lui ouvrir le bide et attendre qu’elle se réveille, vous n’aurez pas beaucoup de câlin à échanger.

Amusant.



Ça te passe au-dessus, tu relèves à peine et le prend sur le ton de la rigolade plutôt qu’une vraie pique. Ce n’est un secret pour personne, ça ne le sera jamais… Et le visage d’ange s’est bien vite évaporé, tu te rends compte à quel point il n’a pas sa langue dans sa poche.

La minutie dont il fait preuve te plaît, aussitôt il te présente son travail terminé que tu étales le liquide de contraste sur ce petit ventre tout doux.

Tu déplaces l’appareil sur son abdomen, cherche tant bien que mal ce qui pourrait s’apparenter à des poches fécondés, mais rien ne s’y apparente.

Et bien heureusement,
ce n’est pas spécialement ce que tu préfères dans ce métier.

Tu lui montres où se trouve le matériel de nettoyage, histoire de ramasser les poils tombés au combat avant de récupérer la chatte pour la mettre sur une deuxième table sur roulette, déjà prête pour l’opération.

dis-tu en te saisissant de tout le nécessaire pour préparer la zone de travail. Nettoyage fait, tu te saisit d’une paire de gants que tu lui donnes une fois qu’il a terminé de nettoyer. Tu prends les tiens, lui montre comment les mettre pour empêcher une contamination et de devoir les changer, avant d'attraper ton scalpel.

dis-tu en attaquant l’abdomen de la minette. Tu n’es pas de ces vétérinaires barbares qui ouvrent toute la ligne blanche, tu coupes légèrement, juste de quoi saisir par la suite les ovaires pour les sectionner.

La journée avait commencé lentement.
Mais tu ne doutes plus de la résolution amusante qu’elle aura.



Tu ne comprends piètre mot en japonais. Semble-t’elle être la langue natale de ton disciple pour une journée, loin de donner une étiquette à cet Ezekiel. Tu ne sais parler que anglais, t’es une quiche en toute autre forme de langage, ça n’a jamais été ton fort. L’école en général d’ailleurs.

dis-tu en coupant ce qui semble être une seconde peau.

Et effectivement, aucun sang, aucune goutte. Tu attrapes ensuite un instrument ressemblant à un crochet et le fais glisser sous les peaux afin d’en ressortir un ovaire assez facilement.

Tu agis en même temps que tu lui expliques, laisse la clampe sur le côté pour laisser retomber l’ovaire et l’empêcher de s’échapper. Tu te saisis ensuite de fils chirurgicaux et m'empresse de faire un nœud à la base de l’organe.

Yuki a donc bien un ovaire en moins, tu le pose sur le côté pour le laisser regarder à quoi ça ressemble de plus près.

lui dis-tu en lui tendant le crochet.

Il aura une belle histoire à raconter à ses amis après ça. Tu peux te permettre de le laisser, car c’est une opération de routine pour toi, littéralement quelque chose que tu fais cinq à six fois par semaine, tu connais le processus par cœur et saura immédiatement reconnaître la moindre erreur. Mais de toute façon, une chirurgie telle que celle-ci, c’est donné à n’importe qui.
T'aimerai bien au fond qu'il panique un peu mais, étonnamment, tu te doute qu'il va être du genre à ne pas se poser de question et à y aller franco.



Et ça, pour le coup, ça t'arrive aussi très souvent.